1. Définition
Le Motion Design est la contraction de Motion Graphics Design. Il comprend donc la notion de mouvement (“motion”) et de design graphique (formes, typographie, mise en page, composition)
Le motion design est l’art de mettre un graphisme en mouvement.
Il y a une dimension industrielle contenue dans le terme “design” : il s’applique à répondre à un besoin souvent commercial.
Le motion design, par définition, donne vie à des objets inanimés.
Et bouger attire l'oeil.
Cette discipline aide donc à communiquer un message de manière beaucoup plus percutante.
Un film d’animation est-il du motion design ?
C’est comme comparer illustration et design graphique : les deux disciplines sont très différentes dans leur approche, mais la première peut être utilisée pour agrémenter la deuxième.
L’illustration a vocation à émouvoir et raconter une histoire, alors que le design graphique sert à délivrer une information. Mais rien n’empêche d’utiliser l’émotion et le storytelling afin de délivrer cette information.
Un film d’animation ne rentre donc pas dans la catégorie du motion design à proprement parler, mais on peut tout à fait utiliser les mêmes techniques pour délivrer un message animé.
2. Un peu d’histoire
Le terme “Motion Graphics” est apparu à la fin des années 1950 avec l’arrivée des premiers ordinateurs. Mais si on considère les formes animées et la typographie, les débuts du motion design remontent à bien plus loin.
Les débuts du cinéma
Les premières formes animées voient le jour avec des expérimentateurs comme Walther Ruttmann, Hans Richter ou Oskar Fischinger dans les années 1920.
Peu après, les logos des différents gros studios de production de films comme Universal Pictures ou la 20th Century Fox s’animent sur les écrans de cinéma.
Mais c’est l’arrivée du générique animé qui marque les véritables débuts de la discipline du motion graphics design avec Saul Bass. Il marquera l’histoire avec des génériques comme The Man With The Golden Arm ou encore Vertigo.
Maurice Binder est aussi un autre pionnier du générique animé, connu pour les génériques de James Bond.
Les débuts de l’ordinateur et de la télévision
Saul Bass, afin de réaliser le générique de Vertigo, s'aide de John Whitney, un génial bidouilleur de machines.
Ce dernier monte sa société en 1961, Motion Graphics Inc., et popularise le nom. Pour la lancer, il crée une bande démo, Catalog, démontrant toutes les capacités de ses machines. On peut y voir toutes sortes de formes animées sur un écran d’ordinateur. Pour l'époque, c'est très innovant.
Quant à la télévision, elle fait émerger de nouveaux besoins, comme les identités visuelles animées des chaînes de télévision, ou encore la publicité. Un vaste terrain de jeu pour les motion designers.
Internet et les ordinateurs personnels
L’arrivée d’internet a permis une diffusion massive de vidéos, et la demande s’est accrue au fil du temps.
Aujourd’hui, TikTok et Instagram sont les rois de la vidéo verticale diffusée en continu, et Netflix celui des séries et des vidéos en streaming. Cela permet de capter l’attention d’un très grand nombre de gens, et de faire passer des messages vidéos à une cible très qualifiée.
Le motion design est donc devenu une discipline très prisée des agences de communication et des acteurs du marketing en général. Les entreprises intègrent même maintenant un pôle dédié à cette discipline.
Pour un article plus approfondi sur l’histoire du motion design, vous pouvez lire cet autre article que j'ai écrit.
3. À quoi sert le motion design ?
Le smartphone a (presque) remplacé le journal papier. Le graphisme animé est devenu une extension naturelle du design graphique statique. Il permet donc beaucoup de choses comme :
- Expliquer des idées complexes de manière simple. La chaine YouTube Kurzgesagt produit des petits documentaires passionnants sur des sujets variés
- Promouvoir ses produits ou ses services sur les réseaux sociaux, ou à la télévision avec de la publicité. Le format graphique animé est très prisé des équipes marketing car il peut multiplier de manière conséquente l’engagement d’une audience sur les réseaux sociaux. Voici un exemple d'explainer video vantant les mérites de Webflow
- Introduire un documentaire ou un film avec un générique engageant qui met tout de suite dans l’ambiance grâce à des animations léchées. Voici l'exemple de Severance, dont l'ambiance surréaliste est parfaitement traduite dans ce générique.
- Habiller des vidéos, en y intégrant des éléments graphiques homogènes, des titrages aux présentations d’invités (appelés “synthés” dans le jargon du motion design). On commence d’ailleurs à voir apparaître des chartes graphiques dédiées à la vidéo. Voici un exemple d'identité TV par César Pelizer pour MTV.
- Améliorer l’expérience utilisateur dans les applications et les sites webs. Les petites animations de boutons, d’écrans, ou d’icônes permettent d’orienter l'œil et participent à la compréhension fine de l’application. En exemple, le guide graphique pour les interfaces iOS proposé par Apple.
4. Quelles sont les compétences nécessaires et comment les acquérir ?
Les compétences
Le motion design est une discipline qui demande des compétences variées et complexes. Elle demande de maîtriser le design tout autant que l’animation. D’ailleurs, un projet complet se fait souvent en équipe, dans laquelle chacun maîtrise une compétence complémentaire.
En voici quelques unes :
- La typographie : elle est très largement utilisée dans le motion graphics design, et il est primordial d’en connaître au moins les rudiments : les différentes catégories, un peu d’histoire et ce qu’elles dégagent en terme de ressenti
- La composition : elle permet de guider l’oeil, de hiérarchiser les informations, de rendre un texte lisible et une image captivante
- Les couleurs : une connaissance du cercle chromatique, des couleurs complémentaires, des valeurs permet de donner la bonne énergie à une image
- L’animation : savoir animer un cycle de marche, comprendre les 12 principes d’animation édictés par les collaborateurs de Walt Disney et les adapter au motion design, comprendre les notions de vitesse et savoir quand les appliquer, comprendre les relations entre les images-clefs (comme le timing et le spacing)
- La narration : savoir raconter des histoires, savoir placer les éléments aux bons moments dans une histoire pour garder le spectateur captivé
- La musique et le son : savoir travailler avec la musique, synchroniser une animation, ajouter des sons audio sur un film, varier les volumes
- La technique : les logiciels utilisés sont souvent complexes et demandent un certain investissement avant de pouvoir les maîtriser, en particulier ceux liés à la 3D
Les lieux d’apprentissage
Les écoles
Les écoles ont l’avantage de faire rencontrer d’autres étudiants passionnés et de vous constituer un réseau pour la suite de votre carrière. Les professeurs sont motivés et peuvent vous débloquer sur beaucoup de sujets si vous leur posez les bonnes questions.
Elles ont souvent des licences gratuites destinées aux étudiants. Et ces écoles vous donnent en plus l’occasion de travailler sur des projets personnels seul ou à plusieurs, ce qui sera sans aucun doute une base très solide pour votre vie professionnelle.
Par contre, elles peuvent être chères et les différents niveaux dans une classe freinent parfois une progression que vous pourriez souhaiter plus rapide.
Voici quelques écoles à considérer :
- Les Gobelins : cette école bénéficie d’une reconnaissance mondiale grâce à sa formation en animation, très sélective et très demandée. La formation en motion design l’est beaucoup moins, mais reste très qualitative
- LISAA : ayant été juré de fin d’année, les projets qui en sortent sont très intéressants. C'est une école solide qui a fait ses preuves
- E-artsup : les enseignants y sont assez renommés et installés dans de très bonnes boutiques, ce qui peut vous aider à trouver les bonnes premières expériences
- Digital Campus : je ne connais pas bien cette école mais leurs diplômes sont certifiés par l'état, ce qui en soi la rend intéressante
Avant de vous engager dans une formation, regardez quels sont les professeurs qui y enseignent et si leurs travaux vous interpellent. Et regardez si la formation est listée dans France Compétences, ce qui vous permettra d’avoir un diplôme d’état à la sortie.
Les cours en ligne
Les cours en ligne sont très intéressants pour augmenter son niveau de compétence à son rythme et pour rencontrer d’autres passionnés. Ils sont en plus beaucoup moins chers qu’une école. Mais ils demandent de la discipline et de l'autonomie.
Voici quelques cours en ligne que je vous recommande. Ils sont en anglais, mais pour être honnête, c’est grâce à eux que j’ai grandement élevé mon niveau dans cette langue :
- School of Motion : des cours très bien expliqués, et suivis par un assistant qui vous fait des retours en direct sur votre travail. La communauté est très active. J’en ai même rencontré plusieurs dans la vraie vie
- Motion Science : des cours plus orientés vers les génériques de film, la typographie et le design, mais avec un style très cinématographique. Ce cours est très complémentaire du précédent. La communauté est petite mais active
- Visual Design Lab : une approche très originale et ludique du design qui vous pousse dans vos retranchements. En plus, Carey Smith, le mentor de ce cours, est plutôt drôle et la formation est étrangement ludique
- Motion Design School : une école dont les cours sont très complets mais beaucoup plus techniques. Ce sont de véritables experts dans leur domaine, mais sont un peu moins pédagogues que les précédents.
Un bon cours en ligne est, à mon avis, un cours dont les exercices sont suivis par un mentor et qui a une communauté active, ce qui est le cas de toutes les masterclasses citées.
Les techniques
Le motion design n’est pas une technique, ni un style. C’est une discipline qui peut être exprimée de bien des manières différentes :
- L’animation traditionnelle, ou image par image : c’est une technique utilisée dans les dessins animés traditionnels comme Blanche Neige et les Sept Nains : toutes les images sont dessinées.
- L’animation assistée par ordinateur : elle utilise l’ordinateur pour calculer les images entre deux images éloignées dans le temps. C’est la technique la plus utilisée aujourd’hui. Elle permet d’aller beaucoup plus vite que la technique précédente, mais elle conduit à un style très différent
- La 3D : cette technique nécessite l’utilisation de logiciels complexes. Avec elle, on peut tourner autour d’un objet dans l’espace sans avoir à le redessiner. La production d’un film en 3D peut être beaucoup plus longue. Le style provoqué par cette technique est souvent très identifiable (comme dans cet exemple de Lucas Zanotto). On utilise aussi la 3D pour simuler la réalité, ou l'intégrer dans des séquences filmées. La 3D générée se fond alors dans l'ambiance du film.
- Le stop-motion : ce sont des animations d’objets physiques, comme des poupées ou de la pâte à modeler. C’est la technique utilisée sur Wallace et Gromit par exemple
Pour en savoir plus sur les différentes techniques, je les ai détaillées chacune dans d’autres articles de blog.
Les outils
Les outils utilisés mènent souvent à des styles particuliers. Voici quelques-uns des plus courants :
- Adobe After Effects : l’outil incontournable pour tout motion designer. Il permet de créer des animations assistées par ordinateur
- Adobe Animate : permet de créer des animations image par image avec un style flat design en aplat de couleurs
- Adobe Photoshop : plus connu pour ses outils de retouche d’image photos, c’est devenu un très bon outil de dessin. Il s’est enrichi d’un système vidéo qui permet de mettre en mouvement ces images, plus texturées et proches d’une animation traditionnelle. Caroline Attia et Kyle T. Webster font des merveilles avec ce logiciel
- Adobe Illustrator : combiné à certains plugins sur after effects, il permet de créer des illustrations vectorielles facilement animables pour le web et les applications mobiles
- Cinema 4D : logiciel qui permet de faire de la 3D de manière intuitive et qualitative. Très utilisée par les motion designers 3d
- Blender : logiciel 3d qui fait la même chose que Cinema 4d, mais en moins intuitif. Ce logiciel a le mérite d’être open source, mais quand même très professionnel. Un très bon logiciel pour s’initier à la 3d
Cette liste est loin d’être exhaustive, mais avec elle, vous pouvez être sûr de pouvoir faire un (très bon) film animé.
C’est aussi possible avec Excel, mais disons que c’est un peu plus long ! (et c'est pour ça que cette liste n'est pas exhaustive)
Trouver l’inspiration
L’inspiration est partout, sur votre table, dans votre rue, sur le reflet de la tomate posée dans votre assiette. Et la meilleure inspiration que vous trouverez n’est peut-être pas dans votre discipline.
Néanmoins, pour avoir une idée de ce qui se fait dans le monde du motion design, voici quelques ressources que vous pouvez apprécier.
Studios reconnus
Voici quelques studios internationaux à (re)découvrir et que j'aime beaucoup :
- Buck : il faut bien avouer que les américains sont très forts. Buck doit être l’un des studios de motion design les plus reconnus
- Illo : studio italien au style très particulier et reconnaissable entre mille
- Blackmeal : un des plus gros studio français
- 17 Mars : agence française spécialisée en 3D
- The Mill : studio international de 3D et effets spéciaux qu'on ne présente plus
- Giant Ant : studio à Vancouver, Canada
- Odd Fellows : studio américain
- IV : studio américain
Réseaux sociaux dédiés
Vimeo
Vimeo est une plateforme vidéo qui est connue pour la qualité des vidéos postées. Ils ont fait le choix de mettre en avant des courts-métrages et des films indépendants, pour notre plus grand bonheur.
Voici quelques liens vers lesquels retourner régulièrement :
- Vimeo Staff Picks : le meilleur de Vimeo, choisi par leurs soins
- La catégorie Animation, avec des films d’animation dans différentes techniques
- La sélection Mograph de la catégorie précédente particulièrement adaptée au motion design
- Le canal Animation, le meilleur de l’animation sur le web
- Stash Media est un magazine en ligne référençant le meilleur du motion design, des VFX et de l'animation
- Motionographer est une institution en ligne qui a beaucoup fait connaître cette discipline dans le monde. Ils récompensent chaque année le meilleur du meilleur avec les Motion Design Awards
- Le canal Wine After Coffee, qui est un peu moins mis à jour aujourd'hui mais qui contient pas mal de pépites
Behance
Behance contient le plus grand nombre des meilleurs créatifs internationaux. J’y ai même trouvé quelques missions freelance.
Chaque jour, quelqu’un de chez eux (un curator) regarde les projets et sélectionne les meilleurs afin de les mettre en avant sur la plateforme.
C’est ainsi que vous trouverez des films particulièrement inspirants sur cette page dédiée au motion design.
Communautés
Elles permettent des échanges directs avec d’autres motion designers dans des espaces dédiés à la discipline, et le plus souvent privés.
En voici deux, ce qui sera largement suffisant pour discuter en français :
- Motion Café : la plus active des communautés francophones. Incontournable.
- Motion Designers Francophone (ou Motion Beer) : récemment déplacée sur Discord, vous y trouverez beaucoup de réponses à vos questions. Cliquez ici pour vous inscrire (lien limité)
Conclusion
Le motion design est une discipline artistique très vaste, complexe à mettre en œuvre et qui demande des compétences techniques poussées, et c’est bien ce qui la rend passionnante.
Nos vies sont en même temps de plus en plus remplies d’images animées. La demande est donc très forte. Veillons à garder cette discipline riche et intéressante en créant toujours le meilleur !
Alexandre Soubrier est un motion designer indépendant qui se passionne pour l'illustration et l'animation. Il a créé le podcast Exquises Exquisses dans lequel il s'entretient avec des auteurs-illustrateurs, et produit ce blog.
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